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La tragique histoire des Kennedy à Palm Beach

JFK, enfant, à la propriété de Palm Beach.
JFK, enfant, à la propriété de Palm Beach.

Les 10 000 habitants de l’île de Palm Beach aiment la discrétion. C’est pour ça (et le soleil) qu’ils sont ici, loin des vicissitudes de leur vie à Chicago, Philadelphie ou New-York le reste de l’année. En ces temps d’élection présidentielle, quand un bel avion se pose à Palm Beach avec le nom de leur voisin écrit en très gros sur la carlingue (par exemple… « Trump »), c’est considéré comme un peu trop voyant, loin du style aristocratique bostonien qu’on cultive sur cette île de Floride… Et ça leur rappelle quelques souvenirs amers ; ceux d’une histoire que beaucoup voudraient oublier… que beaucoup ont déjà oublié… et dont il ne reste presque plus aucune trace à Palm Beach, à part le nom de l’hôpital.

Ici, presque tout le monde vote Républicain. Et cette histoire du XXème siècle qu’ils tentent d’oublier était celle d’une famille entièrement dévolue au Parti Démocrate. Mais ils s’étaient tout de même pris à les aimer ces Kennedy, comme à peu près toute l’Amérique, quand son plus illustre représentant, John « Jack », arrivait en Floride à bord d’un coucou baptisé « Caroline » (prénom de celle qui allait devenir « la petite princesse de l’Amérique ») avant que « JFK » ne change d’avion, pour y venir à partir de 1960 à bord de l’illustre Air Force One.

KFC 461P Joseph P. Kennedy Sr. with sons Joseph P. Kennedy Jr. (left) and John F. Kennedy (right). Palm Beach, Florida, 1931. Photograph by E. F. Foley in the John F. Kennedy Presidential Library and Museum, Boston.
Joseph P. Kennedy Sr. à Palm Beach en 1931 avec ses fils Joseph P. Kennedy Jr. (à gauche), décédé dans un accident d’avion durant la Seconde Guerre Mondiale, et John F. Kennedy (à droite), futur président des Etats-Unis. Photograph by E. F. Foley in the John F. Kennedy Presidential Library and Museum, Boston.

UN CLAN VENU D’IRLANDE

 

Mais, commençons par le commencement… dans le nord… car, à Palm Beach, toutes les histoires de famille débutent quelque part dans le nord. Et elle vient évidemment d’Irlande cette histoire-là, quand un fermier du nom de Patrick Kennedy décide de mettre les voiles pour l’Amérique en 1849. Il devient cultivateur à Boston. Ses enfants deviendront riches et investis en politique. Patrick a un fils qui s’appelle… Patrick, et qui commence à travailler à 14 ans sur les docks de Boston avant de terminer au sénat du Massachussets, après avoir fait fortune grâce à ses saloons. Après Patrick et Patrick, le fils aîné de la 3ème génération se prénomme « Joseph Patrick ». Il est né en 1888 avec une ambition politique plus grande encore que celle de son père. En 1914, il épouse Rose Fitzgerald, la fille du maire de Boston. Dans les années 1920, Joseph Patrick Kennedy étend sa fortune en faisant toutes sortes de business, allant de l’importation d’alcools écossais jusqu’au financement de studios hollywoodiens. Expert en manipulation des marchés financiers, ses actions lui rapportent gros, y compris après la crise de 1929. Il s’investit dans les campagnes électorales, mais il est lui-même devenu tellement puissant qu’il n’ a pas besoin de se présenter aux élections locales. En 1938, il est nommé ambassadeur des Etats-Unis en Grande-Bretagne, une reconnaissance qu’il cherchait depuis longtemps. Sa carrière sera toutefois de très courte durée. Joseph Patrick Kennedy tient en Grande-Bretagne une position pacifiste, alors que dès 1939 l’Angleterre déclare la guerre à l’Allemagne. Joseph Patrick Kennedy est politiquement terminé. Qu’à cela ne tienne…

(photo : Presidential Library and Museum Boston)
(photo : Presidential Library and Museum Boston)

« MON FILS AINE SERA PRESIDENT »

Six ans auparavant, en 1933, il avait acquis cette résidence d’hiver face à l’océan sur l’île de Palm Beach. C’est dans ce bureau qu’il va continuer par procuration, année après année, à gravir sans relâche les échelons de la politique américaine… Par procuration, oui, et toujours à travers la personne de son fils aîné, qui malheureusement changera de prénom au gré des décès tragiques. Ce fut d’abord Joseph Patrick Jr qui fut choisi pour porter les ambitions de son père, avec le clair projet de devenir président des Etats-Unis d’Amérique. Mais l’avion de « Junior » explosera durant la Seconde Guerre Mondiale, le 12 août 1944 au-dessus de l’Angleterre. Tout est à refaire.

La "Maison Blanche d'Hiver". (Photo by Tracy Trumbull / Courtesy Historical Society of Palm Beach County Kennedy Family box)
La « Maison Blanche d’Hiver ». (Photo by Tracy Trumbull / Courtesy Historical Society of Palm Beach County – Kennedy Family box)

Certains de ses autres fils ont des tempéraments plus sauvages. Qu’à cela ne tienne, son second s’appelle John (que tout le monde surnomme « Jack »), et tous les espoirs du patriarche Joseph Patrick sont désormais reportés sur lui ; sur ce jeune homme qui est revenu de la guerre avec une réputation de héros. Pour Joseph Patrick, c’est clair, John va devenir président des Etats-Unis. En 1946 Joseph Patrick Kennedy fait pression sur un sénateur de Boston pour qu’il donne sa démission (en échange du poste de maire), et John se présente à sa place, alors qu’il n’a pas encore fêté ses 30 ans. La course est lancée pour JFK qui devient facilement sénateur. Sept ans plus tard, John épouse Jacqueline Bouvier avec qui il forme un couple glamour et inséparable sur la couverture des journaux. Même si la réalité est bien différente.

Kennedy à Palm Beach
Photo datant de la fin des années 1940, avec Rose Fitzgerald.

LES JOURS HEUREUX A PALM BEACH

En 1955, John dont la santé est fragile, est opéré en urgence. Il passe près de la mort et reste au chaud à Palm Beach durant de longues semaines de convalescence. Il en profite pour travailler sur un livre, « Profiles of Courage », qui gagnera le prix Pulitzer et contribuera à son succès et à sa réputation. Le bonheur familial sur les décennies de photos des Kennedy à Palm Beach n’est pas feint. Certes, la famille a déjà été marquée par plusieurs drames, mais l’insouciance continue au « palais d’hiver », au « Camelot de Palm Beach », comme la presse le surnommera plus tard (en référence au Roi Arthur). Et cette joie de vivre continuera peu ou prou jusqu’à l’arrivée de John à Palm Beach le 10 novembre 1960. Deux jours plus tôt, il a été élu 35ème président des Etats-Unis d’Amérique dans un élan populaire incroyable. Les journalistes font le siège de la villa qui est prise d’assaut par les serviteurs, les conseillers, et les Men in black des services secrets à qui on a oublié de dire qu’il fait chaud en Floride. « Vous êtes obligés d’être habillés comme ça » leur demande JFK à côté de la piscine ? « On n’a pas eu le temps de prendre de vêtements de rechange« , répondent-ils à John qui se dirige vers sa garde-robe d’où il leur ramène une pile de polos. Il vient de commettre le premier acte politique de sa présidence, avant même d’arriver à Washington : rendre plus discrets les services secrets !

(photo : Cecil W. Sthougthon / White House)

Un mois plus tard, le dimanche 11 décembre au matin, un dénommé Richard Pavlick, 73 ans, ancien employé des postes, se gare près du « Chateau Kennedy » de Palm Beach. Sa voiture est entourée de dynamite (« assez pour faire sauter une petite montagne »), et il est bien décidé à percuter celle du « président-élu » alors qu’il sort de la propriété pour se rendre à la messe en l’église St Edward (une plaque est aujourd’hui visible sur la « chaise du président » dans cette église de Palm Beach). Mais quand il voit John sortir en voiture avec femme et enfants, Pavlick décide de remettre son crime à plus tard. Il sera arrêté avant d’en avoir le temps, mais il aura initié la longue liste de menaces contre le clan Kennedy.

Encore quelques heures d’hiver ensoleillé à plaisanter à Palm Beach de manière un peu intime en bord de mer, mais John et Jackie ne s’appartiennent déjà plus : Washington les appelle et l’histoire avec un grand « H » s’empare d’eux tout doucement. John s’enferme pour choisir ses ministres, écrire son discours d’investiture, alors que Jackie tremble devant le choix de sa robe. Elle sait que cette investiture ne sera pas ordinaire, et que les caméras du monde entier viendront les filmer en couleur. Pas seulement son président de mari, mais elle aussi. Elle et lui.

Pâques 1963 à la sortie de la messe à Palm Beach.

 

PRESIDENT A TEMPS PLEIN

Malheureusement, JFK se laisse dévorer par les responsabilités politiques auxquelles il ne trouve d’échappatoire qu’avec ses maîtresses. John et Jackie sont liés pour l’éternité, et ils partageront tous deux les moments historiques de cette période, mais… ils ne se voient pas souvent. « Est-ce que tu savais que mon papa était président des Etats-Unis« , demande Caroline à un photographe au restaurant Hamburger Heaven de Palm Beach? « Tu n’as pas besoin de le dire« , lui réponds Jackie qui promène les enfants. Elle prend sur elle, seule, alors que John est si loin. Octobre 1962. Les choses ne se sont pas arrangées en deux ans. John quitte l’Etat-Major et remonte en ascenseur vers le bureau ovale de la Maison Blanche. Il regarde son garde-du-corps et lui lâche : « on a un gros problème« . Il entre dans son bureau et son premier réflexe est de penser à sa femme qui est à Palm Beach. Il l’appelle et lui explique alors ce que le monde découvrira plusieurs heures plus tard avec effroi : un cargo russe rempli de missiles nucléaires a été bloqué par la Marine américaine à quelques centaines de kilomètres de Palm Beach, alors qu’il se dirigeait vers Cuba pour livrer à la dictature communiste son effroyable cargaison. Un grand nombre des conseillers de JFK lui conseillent de couler le bateau. Le risque de guerre nucléaire n’a jamais été aussi grand. « Nous ne savons pas si nous serons toujours vivants demain. Tu dois aller te mettre à l’abri au bunker de Camp David« , lui conseille John. Et Jackie de lui répondre : « Si quelque chose doit arriver, nous allons tous rester à tes côtés. Je veux être avec toi et mourir avec toi, et les enfants aussi préfèrent ça plutôt que de vivre sans toi. » Jacqueline fera suivre les mots par les gestes et s’envolera pour Washington. Malgré – ou grâce à – la tension extrême, ils se rapprochent pendant ces journées interminables où l’URSS menace le monde. John se contentera de bloquer le bateau, jusqu’à ce que Moscou ne cède et fasse faire demi-tour à son navire. Néanmoins l’émotion des Kennedy n’était pas feinte. JFK ordonne même la construction d’un abri antinucléaire (qu’on peut toujours visiter) sur la petite île de Peanut Island, juste à côté de la propriété des Kennedy à Palm Beach, terminé 9 mois seulement après cette « crise des missiles ».

L'abri présidentiel anti-atomique de Peanut Island (Palm Beach) se visite. (Crédit photo VISIT FLORIDA)
L’abri anti-atomique présidentiel de Peanut Island (Palm Beach) se visite. (Crédit photo VISIT FLORIDA)

 

LA FIN DE JFK

Jackie s’est sentie si proche de lui pendant ce temps. Mais John retourne à sa vie à lui, qui va s’accélérer avec l’arrivée de la campagne présidentielle. Il revient toutefois en Floride régulièrement, et il est à Palm Beach le 17 novembre 1963. Il y passe le dernier weekend de sa vie, avant de partir faire des discours le lendemain à Tampa puis à Miami. La police reçoit une lettre postée de Miami Beach menaçant de faire exploser le président. L’ambiance de l’époque est toujours là. John avait hésité à aller faire campagne dans le très conservateur Texas où il comptait un grand nombre d’ennemis. Il prend néanmoins la route de Dallas, confiant en sa bonne étoile, mais aussi dans sa capacité de séduction. Le 22 novembre à 12h30, la famille Kennedy et toute l’Amérique seront plongés dans le deuil, frappées de plein fouet par une (ou plusieurs) balle. Juste un chiffre pour commenter l’événement : la mort de « JFK » sera le plus long reportage de l’histoire de la télévision américaine, avec plus de 70 heures de retransmission d’affilée sur les trois principales chaînes du pays.

Le président John F. Kennedy, Jackie et Caroline avec leurs amis Anita et Paul Fay et leurs filles, Pâques 1963. Photo courtesy of Kathy Fay.
Le président John F. Kennedy, Jackie et Caroline avec leurs amis Anita et Paul Fay et leurs filles, Pâques 1963. Photo courtesy of Kathy Fay.

LA DYNASTIE DOIT CONTINUER

Le pouvoir ne peut échapper à Joseph Patrick Kennedy. Ses deux premiers fils ne sont plus, mais ça ne l’arrêtera pas. A la minute où John a été assassiné, le vice-président Lyndon Johnson a pris (automatiquement) le pouvoir à sa place. Les Kennedy ne peuvent l’en chasser. Mais quelques mois à peine après l’attentat de Dallas, Robert « Bobby » Kennedy, le cadet de John, rentre en piste : il se présente au siège de sénateur de New-York, qu’il remporte. Tout le monde comprend alors ce qui est en train de se passer, mais peu pensent Bobby capable de réussir comme son frère : il est beaucoup trop à gauche. De facto, il ne pourra pas renverser Johnson à temps pour la Présidentielle de 1965. Bien qu’il soit marié, Bobby est devenu proche, très proche, de Jackie, la veuve de son frère. Au point où de nombreuses rumeurs courent sur leur relation à Palm Beach. Bobby attendra 1968 pour se présenter à la Présidentielle. La campagne des Primaires Démocrates avait pourtant débuté sans lui, le 12 mars 1968, par une victoire dans le New Hampshire du président sortant Lyndon Johnson. Le 16 mars, Bobby annonce sa candidature. Le 31 mars, à la surprise générale, Johnson stoppe sa campagne. Il reste deux mois à Bobby pour convaincre l’Amérique, avant la primaire cruciale de Californie sur laquelle il compte pour prendre l’avantage. La campagne sera néanmoins très dure pour le candidat Kennedy qui soutient les partisans des Droits Civiques. Le 4 avril, leur leader Martin Luther King Jr, est assassiné, ce qui entraîne des émeutes dans tous le pays. Le 5 juin à Los Angeles, il faut attendre tard dans la soirée pour connaître le résultat final de la primaire de Californie. Bobby l’a gagnée. Il sait que désormais tout est possible pour lui. Il monte sur l’estrade, prononce son discours de victoire, sort de la salle par la cuisine, où un militant pro-palestinien lui tire dessus. Il décédera le lendemain.

Bobby Kennedy (photo : Librairie du Congrès)
Bobby Kennedy (photo : Librairie du Congrès)

LA MALEDICTION CONTINUE

Le patriarche Joseph Patrick Kennedy ne verra pas le reste de l’aventure dynastique qu’il a créé ; il disparaît en 1969. Les Kennedy continueront de faire de la politique, comme le plus jeune des 9 enfants, Edward « Ted » qui restera sénateur du Massachussetts jusqu’à sa mort en 2009. Il y aura aussi Caroline, la fille de John et Jackie, qui est l’actuelle ambassadrice des Etats-Unis au Japon. Mais rien ne sera plus comme avant à Palm Beach. Pire… l’hécatombe continuera après la mort de Bobby. Le 25 avril 1984, durant les fêtes de Pâques, et alors que la famille Kennedy était devenue trop grande pour accueillir tout le monde sur Ocean Boulevard, David, le fils de Bobby, est retrouvé mort d’une overdose dans sa chambre d’hôtel de Palm Beach. La mort de ce jeune homme de 28 ans – qui ne s’était jamais remis de l’assassinat de son père – est un nouveau drame pour la ville et pour l’Amérique. Les enfants des frères aînés, John et Bobby, étaient devenus les premiers « princes » du pays, héritiers d’une dynastie dont tout le monde était si fier. Les Américains voyaient en eux une survivance de leurs regrettés parents.

PÂQUES UN SACRIFICE POUR UNE FAMILLE CATHOLIQUE

Jackie Bouvier avait confié à des proches  à propos de son mari, et sur le ton de la plaisanterie: « Je ne sais pas pourquoi ces gens reprochent à mon mari d’être catholique… il l’est si peu » (elle parlait des Protestants). La famille continue de se rassembler à Palm Beach, entre autres pour les fêtes de Pâques. Le Vendredi Saint, nul catholique n’est censé aller faire la fête toute la nuit, mais c’est néanmoins dans le seul club de l’île, le « Au Bar », que William Kennedy Smith part boire un verre le 29 mars 1991 avec son oncle le sénateur Ted Kennedy, et un cousin. William est le fils de Jean, la plus jeune soeur de John et Bobby. Ils rentrent tous à la maison, mais William est accompagné d’une femme qu’il a rencontré Au Bar, et avec qui il part marcher sur la plage. Son procès pour « viol » amènera de nouveau tous les médias des Etats-Unis à Palm Beach. William sera acquitté, mais cette fois c’en est trop. La grand-mère, Rose Kennedy, est décédée cette année-là, et la famille en a beaucoup trop vu dans cet endroit : ils vendent la « Maison Blanche d’hiver » de Palm Beach. C’est la fin d’une épopée qui aura marqué son siècle. Les tragédies n’étaient néanmoins pas liées à cette ville de Floride : Michael, un autre fils de Bobby, meurt d’un accident de ski en 1997 dans le Colorado. Et John John, dont la photo sous le bureau de son père « JFK » avait ému la planète entière, décède à son tour en 1999 d’un accident d’avion. Il avait 39 ans et s’apprêtait probablement à se présenter pour la première fois aux élections sénatoriales. Cette fois, l’Amérique n’a plus de prince. Les meubles de la famille Kennedy à Palm Beach avaient été conservés dans la maison mais ils ont été vendus aux enchères en janvier 2016. A Palm Beach, il ne reste plus des Kennedy qu’un abri anti-atomique qui n’a jamais servi. La tragédie n’est pas allée jusque-là.

 

 

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